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Femmes entrepreneures au Maroc – Quelles particularités ?

Femmes entrepreneures au Maroc – Quelles particularités ?

L’histoire du Maroc est marquée de l’empreinte indélébile de grandes femmes ayant réalisé des percées dans tous les domaines ; des percées qu’on peut aisément qualifier aujourd’hui d’entrepreneuriales, voire de révolutionnaires. Zaïnab Nafzaouia, Khnata Bent Bakkar, Sayyida Al Hourra et bien d’autres ont considérablement contribué à la construction et à la préservation de la nation marocaine au cours des siècles.

Dans le domaine spécifique des affaires, l’entrepreneuriat marocain s’est toujours caractérisé par la grande présence de femmes-entrepreneures. En effet, les Européens eux-mêmes furent étonnés de voir tant de femmes s’adonner à des activités agricoles, artisanales et industrielles dont certaines leur ont été toujours réservées. C’est le cas dans l’artisanat de la fabrication des tapis qui a toujours été l’apanage de la femme en raison de contraintes liées aussi bien à la technique de fabrication

[1] qu’à l’instinct de créativité artistique qui semble être plus développé chez la femme marocaine que chez l’homme.

L’histoire de l’entrepreneuriat féminin au Maroc est plusieurs fois séculaire. En effet, grâce à l’activité de tissage qui a toujours été l’apanage de la femme au Maroc, cette dernière a depuis toujours fait montre de qualités entrepreneuriales indubitables. Dr Mauran écrit au début du siècle :

Les négociants marocains qui font fabriquer des tapis pour les besoins de la place, des environs, des villes de l’intérieur ou de l’exportation, s’adressent à une femme entrepreneur, une mâlema (maîtresse), qui dirige une sorte d’ouvroir où les femmes viennent travailler en commun et reçoivent la nourriture et la modique somme de 0 fr.25 par jour[2].

De Périgny écrit quant à lui :

Dès l’aurore, nombre de femmes viennent apporter leurs écheveaux, reçoivent leur argent et achètent des paquets de laine qu’elles emportent chez elles, pour la laver et la filer. Afin d’éviter qu’elles ne soient trompées, de vieux mueddins de Qaraouiyine rétribués par l’administration des habous sont préposés aux balances des écheveaux et des ballots et leur indiquent la somme qu’elles ont à recevoir[3]

Aujourd’hui, deux secteurs de l’entrepreneuriat féminin cohabitent au Maroc : un secteur artisanal qui a pu se maintenir malgré la forte concurrence des unités industrielles, et un secteur moderne dominé par une nouvelle génération de femmes-entrepreneures hautement formées et institutionnalisées. Ce dernier secteur a connu un développement fulgurant au début des années 90 sous l’instigation des programmes de financement et d’aide au développement de la Banque Mondiale et de certains gouvernements étrangers. En effet, ces derniers exigeaient qu’un pourcentage de 30% au moins soit alloué aux femmes-entrepreneures. D’où le programme ambitieux d’intégration des femmes aux affaires (IFA). Les femmes-entrepreneures sont actuellement encadrées par de puissantes associations comme l’Association des Femmes Entrepreneures (AFEM), l’Espace Point de Départ (ESPOD), Joussour (ponts), etc.

Bien que la plupart des femmes-entrepreneures marocaines soient des innovatrices et surtout des dualistes au sens de Cromie et Hayes (1988), une proportion importante est constituée de radicales féministes. Ces dernières militent en faveur d’une réforme plus osée de la loi sur le statut personnel pour une meilleure équité sociale.

Le statut des femmes au Maroc reste cependant assez précaire. Ainsi, les statistiques montrent que le pourcentage d’analphabétisme est beaucoup plus élevé chez les femmes (surtout rurales) que chez les hommes ; l’équité salariale entre femmes et hommes est encore un vœu pieu ; l’accès au financement bancaire reste encore très difficile pour les femmes, etc.

Dans le domaine des affaires, le pourcentage des femmes chefs d’entreprise oscille entre 7% et 12% selon les sources et la plupart de ces femmes se concentrent sur l’axe Casablanca-Kénitra. Là encore, l’accès des femmes d’affaires au financement reste plus compliqué, ainsi que celui aux marchés publics bien que des avancées importantes soient enregistrées ces dernières années.

En outre, la réalité marocaine montre que, quel que soit son métier par ailleurs, la femme doit d’abord s’occuper de son foyer. Cela veut dire que la femme-entrepreneure au Maroc est d’abord dualiste dans la mesure où elle doit s’occuper de son affaire et de sa famille en même temps. D’une manière générale, il est possible d’identifier les types suivants de femmes-entrepreneures dans lesquels le dualisme précédemment évoqué est une constante :

  • Les femmes artisanes : ce type constitue le prolongement des femmes-entrepreneures d’autrefois qui se spécialisaient dans des activités artisanales comme le tissage et le nouage de tapis ;
  • Les femmes industrielles: cette catégorie recouvre toutes les femmes s’adonnant à des activités industrielles et à des professions libérales modernes ;
  • Les femmes rurales: ce type renvoie à toutes les femmes qui travaillent dans les champs mais s’adonnent également à des activités artisanales dont la production est destinée à l’autoconsommation.
  • Les femmes militantes:  cette catégorie correspond à la catégorie des femmes radicales de Goffey et Scase évoquée dans l’étude de Cromie et Hayes (1988). Il s’agit de femmes œuvrant dans des associations politiques et féministes en vue d’améliorer le sort des femmes au Maroc.

Une particularité de l’entrepreneuriat féminin au Maroc mérite particulièrement d’être notée. En effet, sous l’instigation des programmes étrangers d’aide au développement (ACDI, USAID, etc.) ainsi que des organisations internationales (CNUCED, ITC, etc.), des associations de femmes-entrepreneures ont pris naissance et ont connu un grand essor. Plusieurs autres associations n’ont pas tardé à faire leur apparition dans le sillage de ces premières initiatives et sont aujourd’hui très dynamiques dans la promotion de l’entrepreneuriat féminin dans tous les domaines. Cependant, les activités les plus convoitées par les femmes-entrepreneures restent le tapis, la décoration, l’ameublement, la pâtisserie, les garderies, et les services.

Bien entendu, un tel constat n’exclut pas la présence de femmes entrepreneures dans d’autres secteurs plus sophistiqués comme les TIC, l’aéronautique, l’offshoring et l’automobile. Néanmoins, malgré les bonds de géants faits ces dernières années dans le domaine de l’entrepreneuriat féminin, un grand chemin reste à parcourir vu le potentiel de la moitié douce de notre société.

[1] L’un des critères déterminants dans l’évaluation de la qualité d’un tapis est le nombre de nœuds au mètre carré et leur serrage. Les doigts des femmes, étant plus fins, réussissent mieux le nouage. Progressivement, les femmes qui travaillaient seules au début, ont commencé à recruter d’autres femmes ne pouvant pas financer l’achat d’équipement (métier) et de matières premières et se sont transformées en entrepreneuses ou Mâalmat.
[2] Dr Mauran, « La société marocaine : études sociales, impressions et souvenirs », édition Henry Paulin et Cie, Paris, P. 114.
[3] Cte Maurice De Périgny, « Au Maroc : Fès la capitale du Nord », 4ème édition, éditions Pierre Roger et Cie, Paris 1922, p. 53.

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